Éditorial

L’accélération du transfert du secteur stationnaire des hôpitaux vers l’ambulatoire doit se faire d’urgence. Elle est pertinente sur le plan économique, elle l’est aussi en raison de la pénurie de personnel et elle bénéficie aux patientes et aux patients. Mais à l’heure actuelle, des incitations inopportunes y font obstacle. Un nouveau modèle de financement et une nouvelle structure tarifaire s’imposent.

Avec le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS), le Parlement dispose d’une proposition judicieuse. Après quatorze ans de procédure, cet objet doit enfin être mis sous toit. Pour la première fois depuis longtemps, une mesure pourrait effectivement contribuer à la maîtrise de la hausse des coûts de la santé.

La création d’un système tarifaire combinant les forfaits ambulatoires et la structure à la prestation TARDOC représente une autre étape importante. Les hôpitaux et les cliniques suisses l’ont plébiscitée, ouvrant ainsi la voie à sa concrétisation.

Tant le Conseil fédéral que le Parlement se sont déjà déclarés en faveur des forfaits ambulatoires. Évaluer les mêmes prestations à l’identique n’est pas seulement équitable et transparent, cela permet de supprimer des incitations indésirables. Dans le secteur stationnaire, les forfaits par cas de la structure SwissDRG sont une réussite. Le recours à un même principe en ambulatoire contribuera au transfert des traitements stationnaires évoqué plus haut. Les hôpitaux et les cliniques sont prêts à franchir le pas. La décision finale incombe désormais au Conseil fédéral.

Regine  Sauter

Regine Sauter

Présidente, conseillère nationale

Financement uniforme

Adopter enfin l’EFAS avec des priorités claires

Au sein d’une large alliance, H+ demande au Parlement de mener à son terme l’important projet de financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS). Deux éléments sont essentiels: intégrer les soins infirmiers de manière ferme et ne pas surcharger la réforme.

L’introduction du financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) fait en soi l’unanimité. Très attendue par les hôpitaux et les cliniques, elle contribuera à un transfert pertinent et souhaité du stationnaire vers l’ambulatoire et favorisera les soins intégrés. Lors de l’élimination des divergences par les deux Chambres, des points importants doivent encore être réglés.

Intégration ferme des soins infirmiers
Une large alliance réunissant 22 acteurs de la santé demande au Conseil des États de suivre sa commission de la santé et de s’en tenir à la décision d’intégrer les prestations de soins quatre ans après l’entrée en vigueur de l’EFAS. Cela garantira la sécurité juridique et permettra de lancer la création d’une organisation tarifaire correspondante. Pour que cette intégration puisse se faire, une condition devra être remplie: les coûts des soins infirmiers à la charge de l’AOS devront être produits de manière transparente.

L’alliance juge cependant inutile de lier l’EFAS à la «mise en œuvre complète» de l’initiative sur les soins infirmiers. Ces deux sujets sont sans rapport, tant juridiquement que matériellement. Une telle mesure pourrait porter préjudice à la réforme. Ce n’est pas souhaitable.

Exploitation du potentiel defficacité de la réforme
Avec l’EFAS, seuls les assureurs ont besoin d’accéder aux factures originales, sachant qu’il leur incombe de les contrôler. Pour des motifs de protection des données, il est délicat de mettre à la disposition de plusieurs instances les données sensibles des assurés sous forme non anonymisée. En conséquence, l’alliance s’oppose au double contrôle des factures, en d’autres termes à une vérification supplémentaire par les cantons qui engendrerait une charge et des coûts inutiles.

Après 14 années de procédure parlementaire, H+ et les autres partenaires de l’alliance demandent aux Chambres d’achever rapidement – si possible durant la session d’hiver – cette réforme capitale qui est maintenant aboutie.

Numérisation

Loi sur le DEP: financement à clarifier

H+ est favorable aussi bien à la révision partielle de la loi sur le dossier électronique du patient qu’à la refonte complète de ce texte. Il faut remédier sans attendre et avec précision aux difficultés initiales rencontrées ces dernières années. La question du financement joue un rôle central à cet égard – pour les hôpitaux et les cliniques également.

D’ici à l’entrée en vigueur de la révision complète de la loi fédérale sur le dossier électronique du patient (LDEP), cinq années devraient s’écouler. Selon la proposition du Conseil fédéral, un financement transitoire permettra aux communautés de référence de traverser cette période. Il est envisagé que la Confédération puisse allouer un montant de CHF 30 par DEP ouvert si les cantons en font autant. L’enveloppe financière ne doit pas dépasser 30 millions de francs sur cinq ans au plus.

Subventions: ne pas oublier les hôpitaux et les cliniques
H+ estime qu’il ne suffit pas de prévoir un financement transitoire pour les communautés de référence. Le DEP est un projet d’infrastructure auquel les communautés de référence ne sont pas les seules à contribuer. L’apport des hôpitaux et des cliniques est également substantiel.

Les établissements de santé ont procédé par leurs propres moyens au raccordement obligatoire au DEP. D’autres doivent financer l’infrastructure TI sur leurs deniers également. Mais à la différence des entreprises soumises au libre marché, les ressources financières des hôpitaux proviennent des versements des assurances sociales. Leur rémunération ne repose pas sur les prix du marché, mais sur des tarifs – largement gelés.

Dans ce contexte, on ne saurait attendre des institutions de santé qu’elles procèdent à de nouveaux investissements sans autre soutien financier, sachant que les gros efforts consentis jusque-là n’ont produit aucun bénéfice notable. Il faut donc étendre aux hôpitaux et aux cliniques les subventions destinées aux communautés de référence.

H+ se réjouit qu’une majorité de la CSSS-CN souhaite que des aides financières soient prévues également pour une meilleure utilisation des dossiers existants et pour l’intégration de fournisseurs de prestations. À ces conditions, les chances que le DEP soit un succès sont bonnes malgré tout.

Médicaments

Une piste qui mérite d’être explorée

Malheureusement, l’initiative parlementaire 19.508 sur le dosage et le conditionnement des médicaments n’est pas bien formulée. Elle mélange différents éléments. Mais il y a lieu de l’examiner.

En matière d’autorisation des médicaments, les rôles sont répartis entre Swissmedic et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). Swissmedic examine l’autorisation d’une indication à l’aune de la sécurité et de l’efficacité. Cette analyse conduit au «label» en cas d’approbation. En revanche, l’efficacité, l’adéquation et l’économicité sont évaluées par l’OFSP. Cette évaluation débouche sur une publication dans la liste des spécialités (LS).

L’initiative parlementaire 19.508 réclame une modification des bases légales afin que Swissmedic puisse faire figurer sur la liste des spécialités des dosages et des emballages de médicaments particuliers alors que le fabricant n’en a pas fait la demande. L’idée mérite d’être examinée, car en oncologie notamment, mais dans d’autres domaines également, de plus en plus de thérapies sont réalisées «off-label».

Deux lois sont concernées: la loi sur les produits thérapeutiques (pour la fonction de Swissmedic) et la loi sur l’assurance-maladie (pour la fonction de l’OFSP): il faudrait donc étudier comment les acteurs de la santé pourront déposer de telles demandes ou, autre possibilité, comment la sécurité du droit pourra être garantie aux prescripteurs – par analogie avec la base de données nationale de posologie pédiatrique (SwissPedDose). Il serait impératif de disposer de telles listes pour les femmes enceintes ou les personnes âgées également. Enfin, il convient d’explorer comment les médicaments, respectivement les indications, de ces listes pourront être intégrés dans la liste des spécialités à la demande des acteurs – au sens d’un usage sûr et durable des produits thérapeutiques.

Enea Martinelli, membre du comité de la GSASA

Politique de la santé

L’assouplissement de l’obligation de contracter revient sur la table

Pour le début de la nouvelle législature, Le Centre a déposé une petite bombe: une motion qui demande d’assouplir l’obligation de contracter. Ce texte est déjà à l’ordre du jour de la session d’hiver.

Le groupe du Centre veut charger le Conseil fédéral de modifier la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) afin d’assouplir l’obligation de contracter dans les domaines ambulatoire et stationnaire (motion 23.4088). Ce faisant, la sécurité des soins et les exigences actuelles en matière de qualité et d’économicité devront être respectées.

À notre connaissance, personne ne s’est encore lancé dans le décompte des multiples tentatives de lever, sous une forme ou une autre, l’obligation de contracter depuis l’introduction de la LAMal. Malgré les échecs successifs, la liberté de contracter ressort régulièrement de la réserve d’antiquités de la politique de la santé.

Cet énième essai ne devrait pas déboucher sur grand-chose. Il s’agit une fois de plus de chercher à garantir la qualité et la sécurité des soins via un pilotage des volumes et des coûts; en somme d’une mesure relevant de l’économie de marché en réponse au pilotage des prestations qui tient de l’économie planifiée.

Or, en Suisse, le système de santé a un urgent besoin de l’exact contraire: une politique de l’offre en soins qui définisse des objectifs et, partant, les moyens nécessaires pour la garantir.

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Martina  Greiter

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