H+ Palais fédéral 4/2022

Éditorial

L’hôpital de l’avenir doit prendre en charge les patientes et les patients dans une infrastructure moderne, assurer une bonne qualité à des prix raisonnables et être le pilier d’un réseau de soins intégrés. De plus, des conditions de travail modernes et des salaires assez attractifs doivent contribuer à retenir le personnel et favoriser le recrutement. Mais il y a encore du chemin à parcourir pour y parvenir, car en maints endroits, des infrastructures désuètes attendent d’être rénovées ou remplacées.

Les hôpitaux et les cliniques doivent financer eux-mêmes ces nouvelles charges. Réunir les moyens nécessaires pour investir dans l’avenir et améliorer les conditions de travail sont des tâches d’autant plus ardues que le financement des secteurs stationnaire et ambulatoire est insuffisant et que les hôpitaux sont confrontés au manque de personnel et au renchérissement.

Au surplus, le Parlement et les autorités veulent baisser les coûts de la santé en imposant encore davantage de régulation et des conditions-cadres toujours plus strictes. Les améliorations de l’efficience et les efforts des hôpitaux afin de trouver des ressources financières pour demain sont ainsi réduits à néant. Il faut impérativement ménager aux hôpitaux les conditions-cadres économiques nécessaires pour qu’ils puissent investir judicieusement et se tourner vers l’avenir.

Rolf  Zehnder

Rolf Zehnder

Vice-président de H+, CEO thurmed SA et Spital Thurgau SA

Mise en œuvre de l’initiative sur les soins: premier objectif à portée de vue

La première étape de la concrétisation de l’initiative sur les soins infirmiers est en passe d’être franchie, pour autant que le Conseil national approuve lui aussi le projet lors de la session d’hiver.

Le Conseil fédéral a scindé en deux étapes la mise en œuvre de l’initiative sur les soins infirmiers, à savoir de l’article constitutionnel 117b «Soins infirmiers». La première correspond au contre-projet indirect approuvé quasi unanimement par le Parlement en 2021. Elle comporte une offensive en faveur de la formation en soins infirmiers pour un montant d’un milliard de francs. Au vu de l’actuelle pénurie de main-d’œuvre, cette mesure est urgente. C’est pourquoi il est réjouissant que le Conseil des États ait accepté le projet sans modification. H+ invite le Conseil national à emboîter le pas de la Chambre haute et de sa commission de la santé.

H+ avait soutenu avec conviction le contre-projet indirect à l’initiative sur les soins infirmiers. Depuis toujours, elle défend activement cette solution, en tant qu’association de branche directement concernée – le personnel soignant représente quelque 90'000 collaboratrices et collaborateurs. Ce contre-projet fixe les bases qui conduiront à la formation initiale et continue d’un plus grand nombre d’infirmières et d’infirmiers. Il reprend également une revendication centrale de l’initiative: l’extension des compétences du personnel soignant en matière de facturation. Il s’agit là d’une revalorisation de la profession infirmière tant matérielle qu’immatérielle dont les effets ne doivent pas être sous-estimés. Sans exagération, on peut parler d’un tournant historique pour ce métier. Biffer cette disposition pour des motifs financiers constituerait, selon H+, un revers majeur et incompréhensible, dans le contexte actuel.

Renchérissement

Les tarifs doivent être adaptés

Le renchérissement touche de plein fouet les hôpitaux et les cliniques. Ces derniers ne sont pas en mesure de couvrir l’augmentation de leurs coûts d’une part parce que les tarifs ambulatoires et stationnaires sont trop bas depuis des années et d’autre part parce qu’ils ne sont pas indexés sur l’inflation de manière prospective. H+ exige donc des milieux politiques et des assureurs que tous les tarifs soient augmentés de 5% et qu’à l’avenir ceux-ci soient indexés automatiquement à l’évolution de la situation économique.

Selon une enquête réalisée par H+ en octobre 2022, les hôpitaux et les cliniques s’attendent à d’importantes hausses des coûts en raison du renchérissement: pour l’énergie entre 10 et 50% mais parfois jusqu’à 300%, pour le matériel entre 2 et 20%, pour l’alimentation et la construction entre 3 et 15%. Les institutions doivent financer ces augmentations via les tarifs de leurs prestations – ils n’ont pas d’autre possibilité. Or ils ne peuvent pas simplement augmenter leurs tarifs car ceux-ci doivent être négociés avec les assureurs et approuvés par les autorités.

Premier pas: des tarifs indexés à l’inflation
H+ exige donc des milieux politiques et des assureurs une augmentation linéaire urgente de l’ordre de 5% pour tous les tarifs ambulatoires et stationnaires. Depuis des années, ces tarifs sont trop bas – le secteur de l’ambulatoire hospitalier enregistre un déficit de financement de l’ordre de 30% et le stationnaire de 10%. En outre, les tarifs ne prévoient pas une indexation prospective au renchérissement, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas adaptés automatiquement aux modifications de la situation économique.

Cela doit changer: prendre en compte à l’avenir l’évolution économique avec des tarifs indexés de manière prospective sur l’inflation serait un premier signal positif, même si cela ne résoudra pas le sous-financement chronique des hôpitaux et des cliniques. À cet effet, des hausses de tarifs supplémentaires ainsi qu’un débat sur un nouveau système de financement à long terme sont nécessaires si la Suisse entend garantir à l’avenir le niveau actuel des soins. Sinon, les hôpitaux et les cliniques ne seront plus en mesure de prendre en charge convenablement leurs patients. Il en résultera de longues attentes aux urgences, des reports d’opérations et une dégradation de la qualité des prestations médicales et infirmières.

La pénurie de personnel se fait sentir
La pénurie de personnel dans le secteur hospitalier entraîne une hausse supplémentaire des coûts. Engager et fidéliser les collaborateurs par des conditions de travail attrayantes nécessite des moyens financiers. Pratiquement toutes les institutions indiquent avoir de la peine à trouver suffisamment de personnel. Les places vacantes ne peuvent être repourvues qu’au prix de gros efforts, parfois uniquement à l’aide de temporaires, ce qui engendre également des surcoûts. Les absences pour cause de maladie doivent être compensées, accroissant ainsi la pression sur les autres collaborateurs et provoquant d’autres absences.

La majorité des membres de H+ interrogés s’attendent à une augmentation des salaires des médecins en 2023 en raison du renchérissement général et de la pénurie de main d’œuvre. Pour le personnel soignant, presque tous les membres prévoient une hausse des coûts salariaux de l’ordre de 2 à 5%. Les coûts grimpent également en raison des importants frais de recrutement et de l’engagement de temporaires.

Il est urgent également d’adapter au renchérissement les salaires de tous les collaborateurs dans les hôpitaux et les cliniques. En outre, il convient d’améliorer les conditions de travail comme l’exige par exemple l’initiative sur les soins infirmiers. Mais seules des hausses des tarifs ambulatoires et stationnaires donneront aux hôpitaux et aux cliniques les moyens nécessaires.

Dorit  Djelid

Dorit Djelid

Cheffe du département Communication, directrice adjointe, membre de la Direction

EFAS

L’heure est plus que venue

Le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) est attendu depuis longtemps. Le Conseil des États doit prendre son courage à deux mains et approuver le projet.

L’époque des silos est révolue. L’heure est à l’intégration. La coexistence de régimes financiers différents selon les domaines de soins est dépassée. Avec l’EFAS, l’avenir est en marche et une grave erreur systémique, identifiée depuis longtemps, sera corrigée. En ce sens, H+ est favorable, sur le principe, à l’extension de l’EFAS aux soins infirmiers, comme l’a proposé la CSSS-CE.

Actuellement, divers projets visent à maîtriser les coûts dans un système quasiment condamné aux augmentations en raison d’incitations indésirables. Il est préférable d’attaquer ces incitations à la racine et de les éliminer. Un élargissement de l’EFAS aux soins (de longue durée) accentuerait encore l’impact de cette réforme. Mais il faudra procéder par étapes. Une condition préalable doit en effet être remplie: la transparence devra être complètement réalisée sur les coûts des soins de longue durée à la charge de l’AOS.

La voie sera libre pour de véritables soins intégrés
L’EFAS, en combinaison avec le futur système tarifaire constitué de forfaits ambulatoires et de TARDOC, permettra d’harmoniser aussi bien le financement que la tarification des secteurs ambulatoire et stationnaire. La voie sera libre pour des processus de traitement intersectoriels, efficients et de haute qualité.

Comme tous les membres de l’Alliance EFAS, H+ juge positive la conclusion rapide des débats après les longues discussions de la Commission de la santé du Conseil des États. L’objectif est de maintenir l’élan devant le plénum et lors de l’élimination des divergences pour adopter rapidement un EFAS applicable et le mettre en œuvre. Une des réformes les plus vastes et importantes sera enfin concrétisée.

Secteur ambulatoire

C’est fait: l’organisation tarifaire nationale est fondée

Le 15 novembre 2022, les partenaires tarifaires H+, FMH, santésuisse, curafutura et CTM ont créé l’Organisation tarifs médicaux ambulatoires SA (OTMA).

La fondation de l’OTMA a fait l’objet d’un long bras de fer entre les parties impliquées. Sous la conduite avisée du directeur bernois de la santé, Pierre Alain Schnegg, une solution a néanmoins été trouvée. La formule magique pour la répartition des sièges au conseil d’administration de l’OTMA SA ainsi que les conventions additionnelles sur la reconnaissance réciproque des forfaits ambulatoires et de TARDOC ont été les clés de cet aboutissement.

La fondation de l’OTMA SA est un bon signe pour l’autonomie tarifaire souvent déjà considérée comme enterrée. Il appartient maintenant aux partenaires tarifaires de montrer qu’ils mènent effectivement à bien le système combinant les forfaits ambulatoires et TARDOC. Le Conseil fédéral attend dans l’idéal la soumission des deux structures finalisées d’ici la fin 2023. L’harmonisation, respectivement la coordination, de ces structures sera un enjeu important. Mais H+ est confiante dans le succès de l’entreprise. A fortiori grâce à une incitation introduite par le Conseil fédéral: si les deux structures tarifaires sont soumises et approuvées en même temps, la phase de la neutralité dynamique des coûts tombera. Qui ne mettrait pas tout en œuvre pour y parvenir?

Comité de H+

Regine Sauter est la nouvelle présidente de H+

L’assemblée générale de H+ a élu la conseillère nationale Regine Sauter en tant que présidente de l’association. La Zurichoise succède à Isabelle Moret, qui s’est retirée fin juin 2022 en raison de son élection au Conseil d’État vaudois.

Lors de leur assemblée générale du 3 novembre 2022, les membres de H+ ont élu à l’unanimité Regine Sauter en tant que nouvelle présidente. Regine Sauter entrera en fonction le 1er janvier 2023. Elle est toute désignée pour prendre la succession d’Isabelle Moret.

Regine Sauter est conseillère nationale depuis 2015 (PLR, Zurich) et siège à la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS-CN). Lors de sa première allocution devant les membres, la nouvelle présidente a souligné: «Notre association doit être la voix déterminante lorsqu’il est question de définir les conditions cadres du paysage hospitalier pour les prochaines décennies. Elle en a la compétence et la légitimité.»

En plus de celui de la présidence, deux autres sièges devaient être repourvus au Comité de H+. Uwe E. Jocham, président de la direction de l’Insel Gruppe, a été élu pour représenter le Groupement des hôpitaux universitaires, dont il est le président. De son côté, Daniel Schibler, directeur de l’Asana Spital Menziken, sera la voix du Groupement des associations au Comité.