H+ Palais fédéral 2/2021

Ouvrir une nouvelle ère tarifaire

de Anne-Geneviève Bütikofer
EFAS

Une réforme importante et nécessaire

de Anne-Geneviève Bütikofer
Forfaits ambulatoires/EFAS

Une combinaison idéale

Sécurité de l’approvisionnement

Péril sur l’approvisionnement en médicaments

Assurances complémentaires

Accroître la transparence et l’uniformité

de Dorit Djelid

Éditorial

Si le partenariat fonctionne très bien pour le tarif stationnaire SwissDRG et si la structure a pu être adaptée constamment depuis son introduction en 2012, il en va tout autrement pour l’ambulatoire. Afin qu’une collaboration puisse enfin s’établir dans ce domaine, l’engagement et la participation de tous les acteurs sont nécessaires. H+, santésuisse et la FMCH franchissent désormais une étape importante dans ce sens avec la fondation de l’organisation «solutions tarifaires suisses» au sein de laquelle elles entendent développer des forfaits pour l’ambulatoire d’ici à la fin de cette année.

Ce pas important en direction de la paix tarifaire constitue aussi une base en vue de la création d’une organisation tarifaire nationale pour le secteur ambulatoire, dans laquelle des tarifs au forfait et à l’acte pourront coexister comme des structures complémentaires.

Les forfaits pour l’ambulatoire permettront enfin d’aboutir à ce que les hôpitaux et les cliniques – mais aussi d’autres fournisseurs – pourront dispenser leurs prestations de manière à couvrir leurs coûts. Ils contribueront aussi à améliorer la transparence et à réduire le travail administratif.

Ouvrir une nouvelle ère tarifaire

De nouvelles approches sont nécessaires afin que les coûts du secteur ambulatoire soient enfin couverts. Le projet «Forfaits ambulatoires» des fournisseurs de prestations et des assureurs doit déboucher sur une rémunération plus transparente et équitable.

H+, santésuisse et la FMCH ouvrent une nouvelle ère tarifaire pour le domaine ambulatoire. Après son introduction il y a une vingtaine d’années, la structure TARMED n’a pratiquement pas pu évoluer en raison de différends entre les partenaires. Aujourd’hui, il est impossible pour les hôpitaux et les cliniques de fournir leurs prestations de manière à couvrir leurs coûts. La situation est d’autant plus dramatique que le volume des traitements ambulatoires n’a cessé d’augmenter au cours des dernières années – conformément à la volonté politique et aux progrès de la médecine. Et cette tendance devrait encore se renforcer à l’avenir.

Les hôpitaux et les cliniques ont le droit – et méritent – d’obtenir une rémunération adéquate et équitable de leurs prestations ambulatoires. Or une telle rétribution n’est pas possible avec la structure tarifaire actuelle TARMED. Il en va de même des nouveaux modèles proposés jusqu’à présent. La meilleure solution réside dans des forfaits pour le domaine ambulatoire établis selon les données de coûts réelles des établissements. Cette base de données représente le cœur du projet commun de H+, de santésuisse et de la FMCH. D’ici à la fin 2021, les trois organisations vont soumettre au Conseil fédéral un projet de structure tarifaire fondée sur des forfaits. L’organisation chargée du développement de ces forfaits a déjà été créée: solutions tarifaires suisses. Plus rien ne s’oppose à l’élaboration d’une nouvelle structure depuis que le Parlement a donné son feu vert aux forfaits pour l’ambulatoire dans le cadre des délibérations sur le 1er volet de mesures visant à maîtriser les coûts.

Les forfaits ne devront pas seulement garantir des tarifs couvrant les coûts dans le secteur ambulatoire mais aussi contribuer à améliorer la transparence et à réduire le travail administratif. Un objectif central consistera également à intégrer les forfaits dans la future organisation tarifaire nationale à laquelle devraient adhérer tous les partenaires de ce domaine. C’est ainsi seulement que l’on pourra développer un système tarifaire performant.

EFAS

Une réforme importante et nécessaire

Le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) résoudrait un problème systémique hérité du passé. Il recèle un grand potentiel d'économies et d’encouragement de la qualité.

Les régimes de financement actuellement en place pour les soins ambulatoires et hospitaliers conduisent à des incitations indésirables qui biaisent le choix du lieu de traitement. Idéalement, le fait qu'un patient soit traité en ambulatoire ou en stationnaire devrait dépendre exclusivement de son état de santé et de son environnement social. Les comparaisons internationales montrent que la Suisse en est loin. Seulement 17% des interventions chirurgicales y sont réalisées en ambulatoire. Cette proportion est de 51% aux Pays-Bas et de 62% aux États-Unis.

Le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) n'est pas seulement un moyen de corriger des incitations indésirables et de favoriser l'ambulatoire. En tant que financeurs uniques, les assureurs auront une vue d'ensemble de toute la chaîne de traitement, qui portera aussi bien sur les coûts que sur la qualité des soins fournis. Sur cette base, les assureurs et les prestataires de soins pourront développer des systèmes tarifaires innovants, tels que des forfaits complexes reposant sur des forfaits ambulatoires et hospitaliers ou des tarifs fondés sur la qualité, respectivement sur les résultats.

Pour ces raisons, une intégration des soins de longue durée dans l'EFAS est expressément à saluer. Après tout, les établissements qui les prodiguent font également partie de la chaîne de soins. H+ se rallie toutefois à l'avis du Conseil fédéral et préconise l'intégration des soins de longue durée dans une deuxième étape. Le faire immédiatement surchargerait le projet, voire le mettrait en péril. Cette deuxième étape est nécessaire pour établir la base de données requise et pour permettre aux partenaires tarifaires d’élaborer une structure tarifaire ad hoc.

Forfaits ambulatoires/EFAS

Une combinaison idéale

Les forfaits ambulatoires et le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) constituent des incitations adéquates pour des modèles de soins tournés vers l'avenir.

Les secteurs ambulatoire et hospitalier se distinguent par leurs systèmes de tarification et leurs formes de financement respectifs. Ces différences héritées du passé ne peuvent plus être justifiées aujourd'hui. Les modèles intersectoriels sont de plus en plus importants pour l'efficacité des soins. Pour y parvenir, il faut créer une perméabilité entre les secteurs en harmonisant les tarifs et les formes de financement.

Le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS) permettra de corriger les incitations biaisées dans la tarification des prestations, de telle sorte que les forfaits ambulatoires et stationnaires couvrent les coûts de manière équivalente.

Cela signifie que le choix du lieu de traitement optimal ne sera plus influencé par des incitations financières indésirables. En outre, avec l’EFAS, les assureurs disposeront d’une vue d'ensemble sur toute la chaîne de traitement et auront intérêt à combiner les forfaits ambulatoires et stationnaires en forfaits complexes. Cela favorisera les soins intégrés de manière significative et permettra d'améliorer considérablement l'efficacité et la qualité. Par conséquent, l’EFAS, combiné avec les forfaits ambulatoires, est la principale et la meilleure alternative à un système avec budget global.

Sécurité de l’approvisionnement

Péril sur l’approvisionnement en médicaments

Il manque à la Suisse une stratégie pour l’approvisionnement des malades chroniques en médicaments. Les derniers développements à l’étranger ne laissent pas d’inquiéter.

Les récents évènements donnent à réfléchir. Taiwan reproche à la Chine d’utiliser les vaccins contre le coronavirus pour faire pression sur ses alliés. En contrepartie des livraisons, le Paraguay doit renoncer à reconnaître la souveraineté de Taiwan (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 7 avril 2021). En Inde, les nombres de cas de coronavirus explosent. Ce qui a des répercussions sur la production des principes actifs de médicaments (antibiotiques et autres substances importantes).

Comme beaucoup de pays, la Suisse a compté jusque-là sur le fait que l’approvisionnement fonctionnait sans souffrir d’interruption. En tant que pharmaciens des hôpitaux, nous alertons pourtant depuis plus de 20 ans sur les pénuries qui se multiplient. Les options thérapeutiques bon marché font défaut et les médicaments éprouvés disparaissent toujours plus vite du marché suisse. Cette évolution touche de plus en plus souvent les médicaments destinés aux groupes de patients vulnérables, tels que les enfants, les personnes âgées ou en situation particulière (soins palliatifs, troubles de la déglutition, etc.).

La situation actuelle en matière d’approvisionnement est certes un problème de portée internationale. Mais pas seulement. Beaucoup de produits sont fabriqués «maison». Les règlementations nationales peuvent simplifier beaucoup de choses, mais aussi les aggraver. Qu’on le veuille ou non, le prix également joue un rôle dans ce débat. Une règlementation bâclée peut avoir un effet boomerang auquel le monde politique sera à nouveau confronté.
Il est temps pour nous de régler ce qui peut l’être et de forger des alliances dans les domaines où nous ne pouvons trouver seuls des solutions. À cette fin, il faut un concept clair et une stratégie qui ne porte pas seulement sur les médicaments «vitaux», mais aussi sur tous ceux dont la pénurie peut causer rapidement des problèmes aux patientes et aux patients.

Réglementation

La menace sur les importations de dispositifs médicaux inquiète les hôpitaux

L'échec de l'accord-cadre avec l’UE (InstA) entraverait massivement l'importation de dispositifs médicaux. Le Conseil fédéral est appelé à prendre des mesures à titre préventif.

Le droit révisé des dispositifs médicaux entrera en vigueur le 26 mai 2021. D'ici là au plus tard, l'accord de reconnaissance mutuelle (ARM) entre la Suisse et l'UE devrait être mis à jour afin de garantir l’approvisionnement de la population suisse en dispositifs médicaux de qualité. À défaut, des mesures deviendraient nécessaires pour l’importation, ce qui dissuaderait les fournisseurs étrangers. Des enquêtes menées par Swiss Medtech montrent qu'environ un dispositif sur huit ne serait plus disponible en Suisse. Cela aurait des conséquences négatives sur la qualité des soins médicaux, notamment dans les hôpitaux et les cliniques suisses.

La mise à jour de l'ARM dépend du sort qui sera réservé à l'accord-cadre. Le Conseil fédéral peut toutefois modifier l'ordonnance sur les dispositifs médicaux (ODim) de manière à ne pas créer d'obstacles supplémentaires à l'importation. C'est ce qu'a demandé H+, avec d'autres acteurs du système de santé suisse, dans une lettre ouverte adressée au Conseil fédéral au début du mois de mars. Il en va de la sécurité de l’approvisionnement de la population.

Compte tenu de la probable non reconduction de l’ARM, le Conseil fédéral a pris le 19 mai 2021 la décision de modifier cette ordonnance, afin d’atténuer les conséquences négatives qui en découleraient. Les effets que produira cette mesure ne peuvent pas encore être évalués. Dans l’ensemble, la situation reste difficile.

Martina  Greiter

Martina Greiter

Rédactrice de Competence pour la Suisse alémanique, responsable technique Baromètre des hôpitaux et cliniques

Assurances complémentaires

Accroître la transparence et l’uniformité

L’Autorité de surveillance des marché financiers (FINMA) exige davantage de transparence dans le domaine des assurances complémentaires. Les fournisseurs de prestations et les assureurs sont appelés à trouver ensemble des solutions.

Les assurances complémentaires sont depuis quelques années dans le viseur des autorités. D’ailleurs, elles ont été inscrites parmi les mesures visant à maîtriser les coûts, sous le chiffre M28 «Empêcher les tarifs abusifs dans le domaine des assurances complémentaires». Dans un bref rapport, le Département fédéral des finances (DFF) a proposé en 2018 comme variantes d’étudier un renforcement des instruments de surveillance des marchés financiers sur le domaine des assurances complémentaires et d’impliquer davantage le Surveillant des prix.

En décembre 2020, l’Autorité de surveillance des marchés financiers (FINMA) a estimé qu’il y avait matière à intervenir sur la facturation des prestations. Concrètement, elle constatait sur la base de ses dernières analyses que les factures dans le domaine des assurances complémentaires sont souvent opaques et semblent parfois trop élevées ou injustifiées. La FINMA attendait des assureurs un controlling plus efficace pour remédier à ce genre de dysfonctionnements. Elle exigeait aussi qu’ils vérifient les contrats avec les fournisseurs de prestations et les adaptent si nécessaire. C’est à ces conditions uniquement que la FINMA serait prête à approuver de nouveaux produits d’assurance complémentaire d’hospitalisation. À la suite de ces recommandations, de nombreux assureurs ont résilié leurs contrats avec les hôpitaux et les cliniques afin de les renégocier.

Les fournisseurs de prestations et les assureurs sont maintenant invités à trouver un terrain d’entente sur les assurances complémentaires afin d’accroître la transparence et d’aboutir à une uniformité. En outre, il est essentiel que ces produits d’assurance représentent une plus-value pour les assurés.

Il convient de ne pas perdre de vue dans ce débat que les patients assurés en complémentaire représentent un domaine d’affaires important pour les hôpitaux et les cliniques. La transparence et l’uniformité sont également dans leur intérêt. Cependant, des changements dans les assurances complémentaires devraient aussi relancer la discussion sur les prestations de l’assurance obligatoire des soins. Par ailleurs, les acteurs du secteur de la santé et les partenaires tarifaires doivent se mettre d’accord sur des tarifs couvrant les coûts. C’est ainsi seulement que les incitations biaisées et les abus pourront être empêchés.

Dorit  Djelid

Dorit Djelid

Cheffe du département Communication, directrice adjointe, membre de la Direction